Maryse Hache | du jardin c’est l’heure discrète

vases communicants mars 2011 : abadôn échange avec le Semenoir de Maryse Hache


prolonger par un nouveau texte : marché par le socle

Dans le cadre des Vases Communicants de Mars, Abadon expose cette belle composition plastique, littéraire et florale, dont Maryse Hache est la créatrice. C’est un jardin où je vais à l’aise, goûtant les parfums de la terre, ses couleurs, le printemps.
Moi qui n’ai offert au Semenoir de Maryse, en échange, que les restes d’un hiver pierreux, venteux, et particulièrement austère : « Ici », Semenoir.

M.D.

 

Maryse Hache | du jardin c’est l’heure discrète


du jardin c’est l’heure discrète
de la violette

février finissant
hellébore orientalis
aux côtés de la blanche

petits troupeaux de perce-neige
sur couches de feuilles mortes
crocus en jaune safran

terre se laisse faire et cède racines

aux branches de lilas
petites pointes fermes du tendre vert
à celles des cassisiers
le rose

pivoines arbustivent leur promesse de splendeur
tenue en si petit espace encore

aux aisselles des tiges desséchées
vient la jeunesse des clématites

on avance, à chaque pas sans retour et la grotte est profonde, on avance jusqu’aux grandes lèvres où les phrases flottent dénouées

par-delà les bois, par delà l’hiver, …, je t’envoie mes seins dans leur papier de soie entièrement copiés sur l’envers de mes phrases

au milieu du brillant vert des feuilles
camelia laisse voir touches de rouge

au pied des rosiers encore nus
feuilles de myosotis
feuilles de giroflées

rondes des primevères
bien premières en couleurs

soulangea n’est qu’arbre dénudé portant chandelles grises
mémoire invente la splendeur bientôt déplissée
on attend comme des rois que le monde vienne à nous

tout autour, une couronne d’herbes folles,

feuilles dentelées des géraniums sauvages
tiges vert pré des jonquilles
leur jaune un peu visible sous la transparence

l’aventure fomente sous feuilles brunes de tilleuls
pas tout à fait décomposées
on rêve de marguerites

ça pousse dru en nous

libye se libère

aiguilles du pin font matériau
pour ouvrage des oiseaux
c’est l’heure aussi des nids

mes seins ont tant de bouches
et j’en connais les fruits

du jardin c’est langue discrète
guette le mot et son bouquet
calices et bassinets

ce qui frémit au centre
ce qui murmure au fond
ce qui perce perfore traverse
ce qui fourmille manduque grignote

à même la terre
du jardin c’est l’heure discrète
de la vie
insister

gratitude
jardin ô jardin

Pour les Vases communicants de mars 2011, abadôn accueille Maryse Hache et son Semenoir.

LES MOTS-CLÉS :

© Michèle Dujardin
1ère mise en ligne et dernière modification le 3 mars 2011
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